dimanche 12 février 2012

Hugo Chávez, l'Agence France-Presse et le rôle des médias

La visite du Président iranien Mahmoud Ahmadinejad au Venezuela, le 9 janvier 2012, a fait l’objet d’une couverture médiatique internationale. L’Agence France-Presse (AFP) a également couvert l’événement par le biais, entre autres, de sa chaîne de télévision AFPTV. Néanmoins, l’AFPTV s’est rendue coupable d’une grave dérive en publiant et en manipulant une vidéo tronquée du discours du Président vénézuélien Hugo Chávez, contrevenant à l’éthique journalistique qui impose à la presse de transmettre une information véridique et non biaisée à l’opinion publique. Cette affaire conduit inévitablement à se questionner sur le rôle des médias dans nos sociétés.

L’Agence France-Presse (AFP)

L’AFP est la toute première agence mondiale d’information puisque son histoire remonte à la création en 1835 de l’agence Havas, « pionnière des agences de presse internationales ». En 1944, un groupe de journalistes résistants reprit le contrôle de l’Office Français d’Information – alors sous contrôle du régime de Vichy pendant l’occupation nazie – et le rebaptisa Agence France-Presse[1].

L’institution se qualifie d’« agence de presse indépendante », même si une partie substantielle de son budget dépend des abonnements des services publics, c’est-à-dire de l’Etat. Ses principes fondamentaux, définis dans le statut de 1957, sont néanmoins censés garantir « l’indépendance de l’agence et la liberté d’action de ses journalistes ». D’après son article 2, « l'Agence France-Presse ne peut en aucune circonstance tenir compte d'influences ou de considérations de nature à compromettre l'exactitude ou l'objectivité de l'information; elle ne doit, en aucune circonstance, passer sous le contrôle de droit ou de fait d'un groupement idéologique, politique ou économique ». Ainsi, l’AFP revendique son impartialité et son objectivité[2].

L’AFP dispose d’un réseau conséquent de 2 900 collaborateurs de 80 nationalités différentes, répartis dans 165 pays, lesquels rendent compte en six langues différentes (français, anglais, espagnol, allemand, portugais et arabe) « de la marche de la planète, 24 heures sur 24, en vidéo, texte, photo, multimédia et infographie[3] ». L’agence diffuse ainsi 5 000 dépêches par jour dans tous les domaines de l’actualité et dispose, en plus du texte, d’un service photo international (2 000 photos par jour et 8 millions de photos d’archives), d’une chaîne de télévision AFPTV (500 vidéos par mois) et d’une palette multimédia[4].

L’AFP revendique une marque de fabrique qui fait, selon elle, sa renommée dans le monde entier : la crédibilité. Elle est illustrée par la maxime suivante : « La fiabilité est notre absolue priorité ». L’organisme est composé de « journalistes professionnels expérimentés » qui « exercent leur métier dans la plus grande rigueur », « trient, hiérarchisent les informations, vérifient les faits pour les mettre en perspective ». Selon l’entité de presse, elle fournit « une information rapide, vérifiée et complète sur les événements qui font l'actualité internationale[5] ».

La visite du Président Ahmadinejad au Venezuela

Lors de la visite officielle du Président iranien Mahmoud Ahmadinejad au Venezuela, l’AFPTV a publié une vidéo de 58 secondes sous le titre « Ahmadinejad et Chávez ‘attaqueront Washington’ », dans lequel les journalistes L. Ramirez et L. de Suremain retranscrivent un extrait du discours du Président Hugo Chávez sur le perron du Palais présidentiel. Les deux présidents se trouvent côte à côte, entourés d’officiers militaires. La voix off traduit donc les propos de Chávez et l’extrait se lit comme suit : « Ahmadinejad et moi, depuis le perron du Palais présidentiel, viserons Washington avec des canons et des missiles. Parce que nous allons attaquer Washington[6] ».
Ainsi, dans le reportage réalisé par l’AFPTV, il semble que le Président Chávez menace les Etats-Unis d’une attaque militaire. Les propos semblent assez étranges et surprennent l’opinion publique. S’agit-il d’une déclaration de guerre à l’encontre de la puissance américaine, sachant que les relations entre les deux nations sont conflictuelles depuis plus d’une décennie ? Impossible d’en savoir davantage en raison du caractère succinct de l’extrait.

Une analyse de l’ensemble du discours de Chávez permet néanmoins de découvrir une toute autre réalité. En effet, le discours a été délibérément tronqué par l’AFPTV, qui en a sélectionné un passage afin de faire croire à l’opinion publique que Chávez menaçait explicitement les Etats-Unis. En réalité, les propos du président vénézuélien stigmatisaient la diabolisation de l’Iran et du Venezuela par les Etats-Unis et une grande partie de la presse occidentale. La déclaration complète est totalement différente :

« Les porte-paroles de l'impérialisme disent, les médias de l’impérialisme affirment, et leurs laquais présents dans ce pays le répètent tels des perroquets, que l’Iran se trouve au Venezuela, qu'Ahmadinejad est à Caracas, car en ce moment même, à 2h30 de l'après-midi, comme si nous allions, Ahmadinejad et moi, depuis les sous-sols [du palais présidentiel] de Miraflores, ajuster notre tir en direction de Washington, et que vont sortir de là de grands canons et des missiles car nous allons attaquer Washington. C'est quasiment ce qu'ils disent. Ou que la colline où se trouvent les journalistes, là, va s'ouvrir, et qu'une grande bombe atomique va en sortir. C’est quasiment ce qu’ils affirment. Il faut en rire mais il faut également être attentifs[7] ».

La volonté de manipulation et de tromperie est manifestement évidente, sans compter les erreurs – délibérées ? – de traduction. Face au tollé suscité sur Internet, l’AFP a modifié le titre initial et l’a remplace par « Chávez ironise en disant qu’il va attaquer les USA[8] ». L’Agence a également publié le commentaire suivant sur son compte Facebook :

« L’AFP a publié une version corrigée d’une vidéo sur des déclarations du président vénézuélien Hugo Chavez lors de la récente visite à Caracas de son homologue iranien Mahmoud Ahmadinejad. Sur les six versions de cette vidéo AFP, la version en français comportait une erreur par défaut de mise en contexte d’une déclaration de M. Chavez. Une nouvelle version de cette vidéo, avec mise en contexte, a été diffusée[9] ».

Mais là encore, le nouveau titre – seul changement dans la nouvelle vidéo – est trompeur. En effet, le Président Chávez n’ironise pas sur une éventuelle attaque contre les Etats-Unis mais fustige les déclarations des médias qui prétendent que le Venezuela et l’Iran sont sur le point de déclarer la guerre à Washington. Ainsi, l’AFP transforme une critique de la presse occidentale en un discours belliqueux anti-américain.

Par ailleurs, cet ajustement n’a guère convaincu les internautes, outrés par le comportement de l’agence de presse comme l’illustrent certains commentaires : « C'est l'AFP qui envoie des missiles sur l'information et sur l'opinion publique ! », « La vidéo originale est une preuve irréfutable de calomnie et de manipulation du peuple Français », « agence de propagande », « À croire que le monde veut vraiment la guerre contre l'Iran et le Venezuela », « C'est la nouvelle PRAVDA[10] », « Ce que vous faites est d'une extrême gravité. Vous faites une propagande de guerre », « Comment les "journalistes" de l'AFP ont-ils osé, avec un ce grotesque mensonge prendre un tel risque, surtout à l'ère d'internet où tout peut être contrôlé et vérifié[11] ? ».

En réalité, le discours du président Chávez, qui a duré près d’une demi-heure et qui a été réduit à ces 58 secondes par l’AFP, était davantage un plaidoyer pour la paix mondiale qu’une déclaration de guerre contre les États-Unis comme l’illustrent ces extraits :

-Chávez : « La plus grande aspiration de nos peuples est la paix et on nous accuse de belliqueux ou de va-t-en-guerre. Nous ne sommes pas des va-t-en-guerre. L’Iran n’a envahi personne. La révolution islamique d’Iran n’a envahi personne. La révolution bolivarienne n’a envahi personne. Nous n’avons jamais bombardé quiconque. Qui a envahi des pays et des peuples entiers depuis plus de 100 ans ? Qui a jeté des milliers de bombes sur des peuples sans défense, y compris des bombes atomiques ? Qui a favorisé des coups d’Etat, des massacres et des génocides ? Qui a utilisé la guerre chimique, la guerre biologique et la guerre bactériologique contre des peuples entiers ? Ce n’est pas nous. Nous autres faisons partie des peuples qui ont été agressés. Et nous continuons à être agressés. Et on prétend nous présenter comme étant les agresseurs. Comme le dit Eduardo Galeano : « C’est l’histoire du monde à l’envers ».

De la même manière, le discours du président iranien n’était pas forcément hostile aux Etats-Unis :

-Ahmadinejad : « Nous aimons tous les peuples, y compris le peuple américain qui souffre sous la domination des arrogants. Nous sommes aux côtés de tous les peuples pour qu’ils parviennent à conquérir leurs droits inaliénables. Notre arme est la logique, notre arme est la culture, nos armes sont les valeurs humaines. Nos armes sont l’effort et le travail qui permettront de conquérir les droits de ceux qui souffrent. Notre arme est l’amour, la tendresse et l’amitié pour lesquels nous serons unis à jamais[12] ».

Conclusion

Le cas d’AFPTV est emblématique des dérives journalistiques de plus en plus fréquentes. En effet, de nombreux médias ne jouent plus leur rôle d’informateurs et d’analystes, mais se contentent d’un rôle de propagandiste au service de l’idéologie dominante et de l’ordre établi. La concentration des médias au sein de grands groupes économiques et financiers porte gravement atteinte à l’impartialité et l’indépendance de cette même presse qui répond à un agenda politique bien précis, au détriment de la diffusion d’une information fiable.

Pourtant, la Charte d’éthique professionnelle des journalistes « tient l’esprit critique, la véracité, l’exactitude, l’intégrité, l’équité, l’impartialité, pour les piliers de l’action journalistique ; tient l’accusation sans preuve, l’intention de nuire, l’altération des documents, la déformation des faits, le détournement d’images, le mensonge, la manipulation, la censure et l’autocensure, la non vérification des faits, pour les plus graves dérives professionnelles[13] ».

Au lieu de respecter cette profession de foi, l’AFP s’est rendue coupable d’une dramatique faute professionnelle, trompant l’opinion publique et bafouant les principes fondamentaux de la profession journalistique, en particulier son propre statut. Dans ce cas précis, l’agence s’est comportée comme une officine de propagande destinée à diaboliser le président vénézuélien Hugo Chávez, outrageant ainsi la mémoire de ses pères fondateurs, qui eux avaient choisi, sous le joug nazi, de lutter contre la désinformation, « de passer la vérité en contrebande » si cela était nécessaire – pour reprendre les propos de Robespierre –, afin de la faire parvenir aux citoyens.

Article original en espagnol : Hugo Chávez, la Agence France-Presse y el papel de los medios informativos (Salim Lamrani - 2012-02-07)

Salim Lamrani : Docteur ès Etudes Ibériques et Latino-américaines de l’Université Paris Sorbonne-Paris IV, Salim Lamrani est enseignant chargé de cours à l’Université Paris Sorbonne-Paris IV, et l’Université Paris-Est Marne-la-Vallée, et journaliste, spécialiste des relations entre Cuba et les Etats-Unis.

Contact : Salim.Lamrani@univ-mlv.fr ; lamranisalim@yahoo.fr

Notes

[1] Agence France-Presse, « Notre histoire ». http://www.afp.com/afpcom/fr/content/afp/historique (site consulté le 15 janvier 2012).

[2] Ibid.

[3] Agence France-Presse, « Nos missions ». http://www.afp.com/afpcom/fr/content/afp/nos-missions (site consulté le 15 janvier 2012).

[4] Agence France-Presse, « Nos services ? ». http://www.afp.com/afpcom/fr/content/afp/nos-services (site consulté le 15 janvier 2012).

[5] Agence France-Presse, « Qui sommes-nous ? ». http://www.afp.com/afpcom/fr/content/afp (site consulté le 15 janvier 2012).

[6] Agence France-Presse TV, « Ahmadinejad et Chávez ‘attaqueront Washington’ », 12 janvier 2012. http://www.dailymotion.com/video/xnmnx0_ahmadinejad-et-chavez-attaqueront-washington_news (site consulté le 15 janvier 2012).

[7] Vincent Lapierre, « l’AFP en flagrant délit de manipulation sur Chavez et Ahmadinejad », Agora Vox, 12 janvier 2012. http://www.agoravox.tv/actualites/international/article/l-afp-en-flagrant-delit-de-33296 (site consulté le 15 janvier 2012).

[8] AFPTV, « Chávez ironise en disant qu’il va attaquer les USA », 12 janvier 2012. http://www.dailymotion.com/video/xnmo85_chavez-ironise-en-disant-qu-il-va-attaquer-les-usa_news (site consulté le 15 janvier 2012).

[9] Agence France-Presse, https://www.facebook.com/notes/agence-france-presse/birmanie-le-pouvoir-signe-un-cessez-le-feu-avec-les-karens/350015721677140 (site consulté le 15 janvier 2012).

[10] Ibid.

[11] AFPTV, « Chávez ironise en disant qu’il va attaquer les USA », op. cit.

[12] Vincent Lapierre, op. cit.

[13] Syndicat national des journalistes, « Charte d’éthique professionnelle des journalistes », mars 2011. http://www.snj.fr/spip.php?article1032 (site consulté le 13 septembre 2011).

Le terrorisme au nom de la « démocratie »

1) Il n’a pas exigé des élections qui révéleraient l’État que les citoyens Syriens acceptent et celui qu’ils refusent. Cela, malgré le fait que la nouvelle loi sur les élections a garanti le droit des représentants des candidats de surveiller les urnes du début des élections, jusqu’à l’ouverture des urnes.
2) Il ne s’est pas soucié des millions de Syriens qui ont manifesté en Syrie en criant « non à l’ingérence ! ».
Ceux qui ont suivi les manifestations savent que c’est la réponse des Syriens au projet de l’Occident et du Golfe, et aux bandes armées. Ils remarqueront également que les femmes au foyer ont participé avec ardeur à ces manifestations.

Les dirigeants occidentaux ont ignoré les choix et les volontés du peuple syrien ; ils ont fermé les yeux sur les gangs armés, même après que les observateurs de la Ligue arabe aient consigné leurs crimes.

Une première manifestation de « démocratie » donnée par le Conseil de salut national d’Istanbul [1] a consisté à frapper à coups de bâtons la délégation d’artistes et d’intellectuels et la délégation des opposants syriens de l’intérieur, à l’entrée du siège de la Ligue Arabe au Caire, parce que ces deux délégations refusaient l’ingérence extérieure dans les affaires internes de la Syrie.

Et à la suite du débat sur le dossier syrien au Conseil de sécurité de l’ONU, les partisans de ce Conseil d’Istanbul ont attaqué les ambassades syriennes au Caire, au Koweït, à Athènes, à Amman, à Berlin, à Londres. Ils ont saccagé ou pillé les locaux ; ils ont frappé le personnel qui s’y trouvait.

Quelle belle expression de « démocratie » !
D’où viennent ces « démocrates » soudainement apparus ? La rue syrienne n’a pas entendu leur voix avant mars 2011 !

Alors que nous, les Syriens de l’intérieur, nous avions critiqué la politique qui a conduit à l’économie de marché, et les responsables de cette politique. Nous avions souligné la continuité entre la politique et l’économie, et la relation entre la position politique nationale et les droits de l’Homme. Nous avions mis en garde quant aux conséquences dangereuses de la privatisation. Et nous avions affirmé que le salut de la nation passe par la garantie du secteur public.

Nous, les Syriens de l’intérieur, avions également rappelé l’œuvre de Khaled ALAZEM, l’économiste de la bourgeoisie patriotique qui, dans les années 50, avait participé à la mise en place d’un système public puissant, avec l’aide de l’Union Soviétique. Et nous avions dénoncé publiquement la tutelle exercée par certains hauts fonctionnaires, notamment les maires, et combattu l’expropriation des maisons privées.

Et à cette époque, après avoir participé à des congrès, à des réunions, ou après avoir écrit des articles, nous rentrions chez nous en toute sécurité, même après minuit. Nous allions au théâtre, à des conférences culturelles. Nous nous déplacions entre Damas, Alep et Lattakié. Nous allions chercher l’eau pure de la source Boukein, et cueillir les coings et les pommes de Zabadani. [2]

Tandis qu’aujourd’hui, grâce aux méfaits du projet de « démocratie » occidental et Qatari, le citoyen syrien ne peut plus se rendre en voiture à Alep, car les brigands armés les mitraillent et qu’ils risquent de subir le sort des ouvriers du textile dont le car a été soufflé à l’explosif à Idleb. Ou le sort de l’ambulancier tué à Rastan. Ou le sort du médecin kidnappé à Hama. N’importe quel citoyen syrien peut être tué, pendant que ses tueurs « démocrates » le filment et reçoivent, du Qatar ou de l’Arabie Saoudite, le salaire des images atroces qu’ils livrent à Aljazeera ou Al Arabiya [Leurs commentaires disant que ce sont les forces de Bachar el-Assad qui les ont tués. -NdT].

La Syrie n’a jamais connu un tel mépris de l’être humain ! Et l’Occident et ses laquais du Golfe prétendent débarrasser son peuple d’une dictature ?

Pourquoi donc ne connaissions-nous pas la peur avant mars 2011 ?

Nous nous promenions sans peur. Nous allions de Damas à Lattakié, sur la route de Bloudan [la même route qui conduit à Zabadani – Ndt] embouteillée par les sorties du week-end. Nous allions nous promener à la Ghouta [les vergers autour de Damas – Ndt] durant la floraison des pêchers et subissions parfois les embouteillages sur la route de Lattakié à Damas.

Pourquoi cette « démocratie » est-elle venue semer la peur avec ses tirs, ses explosifs, nous interdisant de voyager, de sortir en excursion en fin de semaine ? Pourquoi répand-t-elle la terreur sur la route aux environs de Talkalakh, en ces lieux où des gangs de tueurs et de trafiquants d’armes peuvent à tout moment attaquer les voyageurs ?

Pourquoi les hôtels de la côte et les routes verdoyantes sont-ils maintenant désertés ? [dans le nord de la Syrie - Ndt] Pourquoi n’avons-nous plus de soirées pour agrémenter nos nuits ? Même dans le quartier paisible de Mezzé, [banlieue résidentielle de Damas – Ntd], une voiture piégée a été déminée hier.

Qui peut oser s’opposer aux bandes armées là où elles déploient leur menaçante influence ? Combien de commerçants dans la banlieue de Damas n’ont-ils pas été tués parce qu’ils ont refusé de fermer leur commerce de manière à simuler une grève générale spontanée contre le régime ?

Nous découvrons, sur les écrans télévisés, qui sont ces opposants qui, en Syrie, mettent à exécution par les armes le projet « démocratique » programmé par les pays du Golfe et l’Occident.

Voici par exemple le cas d’un Libanais qui vivait de la contrebande de marchandises vers la Syrie et qui a perdu son « travail » suite à la crise au Liban. Un autre libanais lui a alors proposé un trafic d’armes et de drogue vers la Syrie. Trois transports lui ont rapporté la somme de 20 000 livres syriennes !

Il y a de quoi méditer sur la situation de détresse, de pauvreté et d’ignorance qui conduit un homme à accepter de devenir une machine à tuer, pleine de haine. Consacrées au financement de projets constructifs, les sommes versées à des bandes armées par les pays du Golfe auraient pu arracher à la misère cette classe sociale déchue.

Aucun doute possible : ces gangs ne sont pas une « armée libre » qui se sacrifie pour sa patrie. Ce sont des criminels ; des mercenaires. A-t-on jamais vu une « armée libre » se réjouir en démembrant ses frères et sœurs, ou en les jetant dans le fleuve Oronte, têtes coupées sanguinolentes ?

A-t-on jamais vu dans l’Histoire humaine une « armée libre » faire exploser des trains, détruire des gazoducs, des oléoducs, des réseaux d’électricité, brûler les immeubles, les biens publics, piller des camions transportant du sucre, du riz ou du mazout, au détriment de son peuple ? A-t-on jamais vu une « armée libre » assassiner les techniciens, médecins, scientifiques, et professeurs d’Universités ; enlever leurs frères et sœurs pour ensuite demander à leurs pauvres parents une rançon en contrepartie de leur libération ?

A-t-on jamais vu dans l’Histoire humaine, des princes et des tyrans financer une « armée libre » patriotique ? Est-il pensable qu’une armée arabe patriotique puisse être équipée d’armes fabriquées par l’État d’Israël qui occupe le Golan syrien ? Est-il acceptable que des chaînes télévisées étrangères se consacrent à filmer et présenter des criminels d’une prétendue « armée libre » sous un angle élogieux !?

Radwan Zyiadé (photo) , membre du Conseil de salut national, a demandé que le dossier Syrien soit étudié sous l’article 7 [de la Charte des Nations Unies –Ndt], qui autorise une intervention militaire étrangère contre la Syrie. Y a-t-il jamais eu des mouvements de libération dans le monde qui ont vu leurs dirigeants réclamer une intervention militaire contre leur propre pays ?

Tout au contraire, les mouvements de libération ont été créés pour empêcher l’ingérence !

Donc, le différend entre la Syrie, les dirigeants occidentaux et leurs acolytes syriens, ne porte pas sur la démocratie. Ces États, qui soutiennent les régimes tyranniques du Golfe, qui ont envahi la Lybie, qui ont commis des crimes à Abou Ghraïb, qui ont tué plus d’un million d’Irakiens, et qui garantissent l’impunité des criminels de guerre israéliens, ne défendent pas la démocratie.

Le célèbre journaliste Mohamed Hasanein Haikal nous dit : « Ce que vit le monde Arabe actuellement n’est pas un printemps, c’est un nouveau Sykes Picot pour le diviser et se partager ses richesses et ses positions stratégiques. »
Je puis en témoigner. Je fais partie des onze membres, d’horizons différents, qui ont rédigé la nouvelle loi sur les médias ; le premier résultat obtenu sur le chemin des réformes. Nous nous sommes inspirés des lois établies en Occident pour garantir le respect de la liberté de l’information qui, découvrons-nous, ne sont pas respectées par les médias occidentaux qui cachent à leurs peuples la vérité sur les événements en Syrie. Nous avons entendu des représentants des Nations Unies, et des médias égyptiens et libanais. Nos réunions étaient très animées, les différents avis s’affrontant. Nous avons su nous mettre d’accord sur la loi qui garantit le droit à l’information, l’interdiction d’emprisonnement. Et qui exige la transparence et la déclaration du financement des médias et l’interdiction d’autorisation à n’importe quel média qui serait fondé sur des bases confessionnelles ou ethniques. Et nous nous sommes mis d’accord pour que la relation avec les chaînes, les journaux et les radios ne dépende plus du Ministère de l’information, mais d’un « Conseil national de l’information à créer ».

Ce conseil a vu le jour le 20 novembre2011. Il est composé de personnalités variées ayant une expérience dans les médias, et qui partagent l’objectif de protéger la liberté d’expression sous le toit de la patrie. Ce conseil a organisé des rencontres avec diverses personnalités médiatiques, qui ont fait part de leur expérience et de leur critique pointue de la réalité médiatique et politique, et qui ont exprimé leurs points de vue et leurs propositions. Le Conseil a pris note de tout cela pour en tenir compte dans la rédaction de la politique relative aux médias.

Dans le bâtiment où nous nous rencontrions, se réunissait aussi la commission chargée de la rédaction de la nouvelle Constitution, composée de personnalités venues de la société civile, des partis politiques ainsi que de techniciens et de spécialistes. Des articles que l’ont croyait intouchables ont été complètement modifiés. Le texte de la nouvelle Constitution sera publié et soumis à référendum.

Pendant ces mois orageux, a été rendue publique la Loi sur les partis qui interdit qu’ils soient créés sur des bases religieuses, confessionnelles ou ethniques, et qui exige la transparence de leur financement. Quatre nouveaux partis ont été constitués. La loi sur les élections a déjà été publiée. Ces lois sont les bases d’une nouvelle vie politique. Pouvons-nous l’ignorer ?

Nous ne pouvons pas ignorer non plus un événement d’une grande importance : la rencontre consultative qui a réuni 200 personnalités syriennes, représentant les divers courants politiques et idéologiques, présidée par le vice-président de la République. J’y ai participé en tant qu’écrivain indépendant. Nous avons entendu des interventions que, je pense, aucune institution politique arabe dirigeante ne supporterait. Certaines ne réclamaient pas seulement la suppression de la constitution du paragraphe relatif à la gouvernance du pays par le parti Baath, mais demandaient la suppression du parti lui-même, en feignant d’ignorer ce que ce parti a apporté en matière de santé publique, d’éducation nationale et d’aide économique dont jouit le peuple syrien, sans oublier sa politique étrangère d’indépendance nationale et patriotique… en feignant aussi d’ignorer les bandes armées qui sévissent actuellement sur notre territoire !

N’importe quel politicien objectif ne peut ignorer que le parti Baath est la colonne vertébrale de la vie politique syrienne aujourd’hui, et que sa suppression ou sa dissolution entraînerait un chaos semblable à celui qu’a connu l’Union soviétique après sa chute. Ceci ne nie pas la nécessité nationale de l’épurer des opportunistes et des corrompus. Et ceci s’applique aussi aux autres partis.

Et c’est ainsi que se sont déroulées, durant les derniers mois, des réunions pour étudier les événements en Syrie, dont une réunion rassemblant environ 400 anciens diplômés de Russie et des États de l’ex-Union soviétique, dont beaucoup se sont exprimés avec extrémisme et dureté. J’ai parlé du libéralisme économique qui a créé une couche sociale pauvre que l’ingérence étrangère a instrumentalisée. J’ai critiqué les partis politiques qui se sont éloignés du peuple, le laissant aux mains des imams des mosquées. J’ai demandé la mise en jugement du ministère du tourisme, de l’ancien gouverneur de Homs, et la mise à l’écart du président de l’Union des écrivains.

Malgré tout cela, nous sommes rentrés chez nous en toute sécurité.

J’ajoute que je suis intervenue dans les congrès des écrivains, critiquant la manière de diriger le pays, les membres de cette direction, et la corruption. Nous étions de nombreux écrivains à aller dans le même sens lors du dernier Congrès des écrivains, avant les événements. Dix sept écrivains ont critiqué sans réserve les institutions politiques.

En outre, nous avons combattu l’expropriation de la rue du Roi Fayçal par la municipalité qui voulait tout démolir. Nous avons arrêté le projet. Nous avons arrêté la destruction d’un ancien quartier arabe que les Français connaissent et étudient, au cœur de la ville moderne de Damas.

Nous combattons les promoteurs, la corruption des mairies, et l’infiltration sioniste par des prix attribués à l’élite culturelle de Damas.

La lutte apparaît ainsi complexe, pas seulement reliée aux divers courants politiques, mais également aux intérêts de divers groupes, ou aux visées de certains. C’est pourquoi nous insistons sur la nécessité de faire prévaloir la compétence et la loyauté à la patrie, et non pas la loyauté au parti. Les autres partis aussi – et pas seulement le parti Baath – mettent en avant la loyauté au parti.

Nous répétons le dicton : le droit ne meurt pas tant qu’on le revendique. Je crois que la démocratie se construit pierre par pierre, et ne s’importe pas.

Qu’amène aujourd’hui le projet « démocratique » de l’Occident et des pays du Golfe ? Il ne fait que rajouter à nos soucis ses bandes armées et sa guerre médiatique ! Il n’écoute pas les millions de Syriens qui crient : « non à l’ingérence ». Sa démocratie commence là : « avec nous ou contre nous. »

Parce que nous refusons cette ingérence et que nous croyons que tous les courants doivent participer à la vie publique pour la corriger, et améliorer la vie en Syrie.

L’opposition extérieure, exactement comme les bandes armées, accuse ceux qui ne sont pas d’accord avec eux, d’être à la solde du régime. Quoi que pensent ces prétendus « démocrates » des Syriens qui refusent l’ingérence étrangère et arabe, nous disons en toute franchise que les Conseils qui sont créés dans le giron de l’occupant occidental, avec l’argent qatari, sont coupés du peuple syrien.

Je n’arrive presque pas à croire qu’un intellectuel comme le chef du Conseil national d’Istanbul, ne sache pas que « couloir humanitaire » signifie intervention militaire ! Qu’il ne sache pas que le Conseil de Sécurité a décrété l’embargo contre l’Irak, mais n’a pas libéré le Liban, et n’a pas utilisé l’article 7 pour empêcher l’État d’Israël de massacrer le peuple palestinien ! Qu’il ne sache pas que les « négociations » n’ont pas amené les Palestiniens à libérer un pouce de leurs terres, et n’aboutiront jamais à la libération du Golan !

Que ces prétendus « démocrates » nous permettent de refuser un tel comportement.

Nous répétons, avec le peuple syrien : ce qui ce passe en Syrie n’est pas une révolution mais crimes, chaos, et destruction d’un pays qui connaissait la sécurité. Le changement en Syrie est refusé s’il est imposé par une ingérence extérieure, et accepté s’il est obtenu par la voix des urnes.

L’attaque contre les ambassades syriennes n’est pas une action politique ; c’est l’œuvre de voyous et de malfrats.

Je répète ce que j’ai dit dans un débat télévisé : les constitutions sont modifiées pour correspondre aux évolutions des peuples, mais doivent l’être avec respect car elles font partie de la mémoire des peuples. Le changement en Syrie ne se fondera pas sur le mépris du passé et les courbettes aux dirigeants politiques extérieurs.

En tous cas, ce n’est pas l’amour de la démocratie qui fait se précipiter les princes du pétrole et les dirigeants occidentaux de l’occupation pour organiser les bandes armées, encenser la façade syrienne émigrée, et acheter les décisions de la Ligue arabe.

Cette démocratie n’est qu’un papier d’emballage trompeur, enveloppant un projet de réorganisation de la carte de la région par la force ; et qui vise à arracher la pierre syrienne du mur de la résistance arabe. Ces propositions sanglantes cachent la stratégie occidentale sioniste et protègent les crimes des bandes armées.

La séance du Conseil de sécurité sur le dossier syrien nous a montré les représentants de la trahison suprême, face à la dignité syrienne en la personne de Bachar Al Jaafari (photo), de sa culture, son honnêteté et sa douleur.

La vraie discorde porte sur notre droit de souveraineté nationale, et notre refus de l’occupation israélienne. Un droit lié à nos traditions nationales et à notre Histoire syrienne ; que nous avons hérité de Choukri Al Asali, député de Damas au parlement turc en 1911, qui a démasqué l’infiltration sioniste en Palestine. Ceci fut l’une des raisons pour lesquelles il a été exécuté ainsi qu’une élite d’intellectuels et d’hommes politiques de la bourgeoisie syrienne.

La Palestine est dans le cœur des Syriens
Depuis le Congrès Syrien de 1920 qui a déclaré l’indépendance de la Syrie et le refus du pays sioniste - en passant par la révolution syrienne qui a donné à la Palestine Al Kassam, qui y a organisé la résistance, et fut tué en 1935, et l’insurrection simultanée syrienne et palestinienne contre l’occupation en 1936 - des Syriens se sont dévoués pour protéger la Palestine, dont Said El AAS, le penseur révolutionnaire, qui y est tombé en martyr.

La Palestine est dans le cœur des Syriens ; il n’y a pas de Syriens de la génération de l’Indépendance qui n’aient pas participé à la défense de la Palestine et il est difficile de compter les martyrs syriens en Palestine.

M. DEBJEN qui était à l’orphelinat islamique de Homs, que mon beau père a fondé, m’a raconté qu’avec deux de ses amis, il s’est engagé pour lutter contre l’occupant sioniste en 1948 ; ils étaient très jeunes, le troisième n’est pas revenu.

En 1949, le dictateur Hosni al Zaïm a déclaré qu’il nouerait des contacts avec l’État d’Israël ; le prince Adel Arslan, ministre des affaires étrangères, lui a aussitôt répondu : je ne reconnaîtrai pas cet Etat et je ne rencontrerai pas son ministre des affaires étrangères et je ne permettrai à aucun fonctionnaire de mon ministère de le rencontrer. Ce sont les contacts d’Hosni al Zaïm avec Israël qui ont conduit à son assassinat.

La mémoire de chaque Syrien est pleine de noms et d’images inoubliables de la lutte arabo-israélienne. En raison de ce passé sanglant, les Syriens sont convaincus qu’Israël, en plus d’être un État raciste, est une base militaire d’occupation qui protège le projet de domination occidental dans la région, comme l’ont prouvé ses attaques agressives et expansionnistes. En tant que Syriens notre résistance à l’expansionnisme est dans notre âme ; et notre vie même est tressée autour de cette lutte. C’est ainsi que notre destin personnel est lié au destin de la Syrie, qu’on veut arracher à la résistance arabe.

Dans son discours du 4 février, l’ambassadeur de Syrie à l’ONU, M Bachar JAAFARI, a cité deux vers du poète Nizar KABBANI rappelant des certitudes profondément ancrées dans l’âme syrienne. Car Nizar KABBANI, n’est pas seulement l’enfant adulé de la bourgeoisie damascène, connu pour ses poèmes d’amour ; il a porté comme chaque Syrien, les valeurs du panarabisme ; il a écrit : « la poésie est lâche si elle n’est pas portée par la colère ». Sa colère s’adressait à ceux qui se sont précipités pour signer des accords avec Israël et aux hommes corrompus du pétrole. C’est pourquoi ses funérailles ont donné lieu à un grand hommage populaire. Un avion privé syrien envoyé par le président avait transporté sa dépouille de Londres à Damas. Les Syriens se sont emparés du cercueil et l’ont porté sur leurs épaules dans un cortège populaire que Damas n’avait plus vu depuis les funérailles de Fakhri Al Baroudi, l’homme de l’indépendance, le compositeur des hymnes que les peuples arabes se sont transmis.

Les gens l’ont porté jusqu’à la mosquée des Omeyyades, le plus important monument construit par les Omeyyades à Damas ; ils ont prié et l’ont porté à nouveau sur leurs épaules jusqu’au cimetière, traversant Damas du nord au sud, à pieds, car KABBANI a mêlé sa loyauté à sa ville, à la loyauté au panarabisme. Il a incarné l’âme syrienne par sa douleur pour la Palestine, par son refus du sionisme, par son mépris des dirigeants pétroliers et par sa fierté de la civilisation syrienne.

Bachar JAAFARI a exprimé cette essence profonde lorsqu’il a cité ces deux vers du poème de Nizar : « ô Damas, trésor de mes rêves et de mes escapades, me plaindrai-je à toi de l’arabisme ou des arabes ? » Si les représentants du Qatar et de la ligue Arabe étaient cultivés, ils auraient su que la suite du poème leur rappelle qu’en trahissant la Syrie ils trahissent aussi la Palestine.

KABBANI dit dans ce poème : « Ils ont abreuvé la Palestine de rêves colorés, ils l’ont nourrie de paroles vaines et de discours, ils ont vécu en marge des événements et n’ont pas bougé pour la terre volée et l’honneur violé. Ils ont laissé Jérusalem nue à même la boue, livrant ses seins à tout venant ».

Qui sont-ils ceux là qui gaspillent l’argent et ne secourent pas la Palestine ? KABBANI les a énumérés : Ceux qui se sont baignés dans des mers de pétrole, ceux qui ont bu le sang des hommes libres ! Et leurs représentants au Conseil de sécurité siégeaient en face de JAAFARI : le Qatari et sa suite, le président de la Ligue arabe dont le fils travaille au Qatar !

Il est donc impossible d’imaginer un État syrien coupé de son Histoire et de sa mémoire ! Impossible car le peuple porte sa mémoire dans son âme ; ce ne sont pas des pages de livres d’histoire. Il y a là un fossé entre des millions de Syriens fiers de leur Histoire, et une poignée d’intellectuels inconnus avant que les médias occidentaux ne leur battent les tambours, et ne les poussent en avant comme des « représentants légaux » de la Syrie, le Qatar ayant financé leurs réunions, leurs hôtels et leurs déplacements.

L’utilisation de l’ancien drapeau dans leur réunions, imitant les Libyens à qui le Qatar a apporté des milliers de drapeaux royaux, n’est pas passé inaperçu aux yeux des Syriens.

Par contre, ceux qui l’ont brandi n’ont pas remarqué que c’est le drapeau de la résistance contre l’occupation française ; le drapeau de la souveraineté nationale ; le drapeau des Syriens qui ont combattu le sionisme et Israël ; notre drapeau que le président Chukri Al Kouatli a mis de côté en cédant son siège à NASSER, au nom de l’Unité Arabe.

La rencontre et le dialogue sont-ils possibles entre ces deux camps ? La condition du dialogue est la position envers l’Etat d’Israël et le sionisme, et vis-à-vis de l’ingérence extérieure. En Syrie, il y a des opposants honnêtes, non corrompus par l’argent du Qatar ou de l’Arabie Saoudite, n’ayant touché aucun pot de vin occidental, n’ayant pas bradé la souveraineté nationale, et ayant une position claire vis-à-vis d’Israël et du sionisme.

Ceux-là affichent leur rejet de la corruption politique et financière. Ils exigent une transparence qui, peut être, ne peut exister. Ils peuvent avoir des points de vue irréalistes, mais ils se distinguent par leur maturité politique et leur courage. Le Dr Faez FAWWAZ et Salim KHEIRBEK ont passé plus de dix ans en prison. Malgré cela, ils ne sont pas tombés dans la haine qui pousse à la vengeance, jusqu’à la destruction du pays.

De pareils opposants sont les garants de la démocratie et de la droiture ; de la souveraineté et de la protection de la société contre le fléau de la corruption. Pour ne pas répéter des erreurs comme celles qui ont conduit à ce qu’un homme corrompu, comme l’ex- gouverneur de Homs, puisse trahir son pays et fermer les yeux sur la construction d’un réseau de communication souterrain, participant ainsi à la préparation de la rébellion.

La position envers Israël, le sionisme, et l’ingérence extérieure, est pour les Syriens la condition pour le dialogue national ; c’est pourquoi le politicien Qadri JAMIL [figure de l’opposition de l’intérieur - Ndt] a annoncé : « Nous ne participerons pas à un dialogue où le Conseil d’Istanbul serait présent ». C’est ainsi que les Syriens rejettent ceux qui rencontrent la télévision israélienne, ceux qui font appel au sioniste Bernard-Henri Lévy, pour qu’il fasse en Syrie ce qu’il a commis en Lybie ; ceux qui se sentent honorés de rencontrer Clinton, Sarkozy et Juppé.

Ceci n’est pas qu’une question politique, c’est une question de conscience et de morale, et les Syriens en sont fiers.

Enfin, c’est le droit des Syriens, après avoir regardé la séance du Conseil de sécurité sur le dossier syrien, de se sentir fiers d’être plus humains, et plus cultivés, et plus démocrates que ces menteurs représentant les forces d’occupation occidentales qui ont versé le sang des Libyens, des Irakiens, des Libanais. Il est de leur droit de mépriser ces politiciens menteurs qui, hier, affirmaient que l’Irak possédait des armes de destruction massive, et qui affirment aujourd’hui que l’armée syrienne tue les civils alors que des dizaines de soldats syriens sont tués chaque jour.

Lorsque l’on compare Bachar al-ASSAD aux chefs d’États occidentaux qui, par le mensonge, dissimulent les buts de leur guerre contre les peuples, la différence est énorme. Ces derniers se moquent de la « démocratie occidentale » : SARKOZY n’a pas supporté la révolte des jeunes des banlieues et les a pourchassé, et la « démocratie » d’OBAMA n’a pas toléré les Indignés pacifiques contre la voracité capitaliste. Ce sont ces « démocrates » qui demandent aux Syriens de supporter les crimes de bandes armées !

En suivant la séance du Conseil de Sécurité, les Syriens ont vu des hommes de grande stature face à des nains. Ils ont vu des personnalités occidentales -qui n’ont probablement pas lu le « Faust » de GOETHE cité par Bachar JAAFARI- qui mentaient, sans honte aucune, devant lui. Et les représentants russe et chinois qui eux ont appuyé la Syrie par leur veto, signifiant à l’Occident colonialiste qu’il n’avait plus les mains libres pour imposer sa démocratie sanglante.

Dr Nadia KHOST
6 février 2012.

Traduit de l’arabe par Rim (le 9 février 2012) pour le site silviacattori.net.

[1] Le Conseil de salut national a été élu par l’opposition syrienne le samedi 16 juillet 2011 à Istanbul

[2] Boukein et Zabadani sont des lieux de villégiature proches de Damas, dans les montagnes sur la route du Liban ; la vallée de Zabadani est réputée pour ses vergers